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En période incertaine, crise ou récession, consolidez vos bases et faites évoluer votre entreprise. Si les semaines devant nous ne brillent pas par leur clarté, il nous faut néanmoins avancer. Cinq points de repères pour vous y aider : les finances, la clientèle, l’équipe, les processus, le leadership.
Vos finances.
En période de crise ou de récession, il est vital de pouvoir faire face aux charges courantes qui ne seront pas couvertes par un chiffre d’affaires en baisse. Cela suppose d’avoir suffisamment de trésorerie d’une part, et de disposer de tableaux de bord pertinents et à jour. Si votre comptabilité est chaotique ou irrégulière, si vous n’avez pas de processus de gestion de trésorerie, si vos contrôles des stocks sont insuffisants, dans ce nouvel environnement, les problèmes vont croître de manière exponentielle. En période de crise et d’incertitude, les principes de base de votre entreprise doivent être efficaces et précis.
En ce qui concerne la trésorerie, vous mettrez en place des mesures qui feront rentrer de la trésorerie, et d’autres qui permettront d’en limiter la sortie. Sollicitez toutes les aides possibles, recouvrez vos créances (faites-le vite et sans relâche, car certains clients iront puiser dans vos ressources !!!) et écoulez vos stocks.
De même, limitez vos dépenses et réduisez vos coûts, en particulier les coûts opérationnels. Remettez à plus tard les investissements qui peuvent l’être, et renégociez les termes de vos prêts et de vos finances. Lorsque vous réduisez les coûts, considérez que les réductions peuvent n’être que de courte durée. Ne faites pas de coupes trop importantes qui pourraient limiter votre capacité à répondre aux nouveaux besoins des clients sur votre marché.
Voir aussi: Faire du seuil de rentabilité un outil de décision stratégique
Cas du Prêt Garanti par l’Etat.
En soi, le PGE est une excellente opportunité. Mais attention toutefois ! Utilisez-le pour anticiper un besoin de trésorerie et rebondir après la crise. A l’inverse, ne l’utilisez pas pour régler des arriérés ou, a fortiori, réaliser des dépenses qui ne rapporteront pas à court terme. Ce qu’il faut surveiller à ce stade, c’est votre équilibre endettement / liquidités. Trop de dettes par rapport à vos liquidités peut vous amener à la perte, car votre trésorerie sera consacrée à rembourser vos dettes, et non à maintenir votre place sur le marché.
Vos tableaux de bords.
Faites-les suffisamment précis pour avoir une vision juste de votre situation actuelle. Et faites aussi des simulations, avec plusieurs scenarii, ce qui vous permettra de quantifier vos besoins et ajuster vos actions. En d’autres termes, utilisez vos tableaux de bord pour vous préparer au pire tout en planifiant le meilleur.
Votre équipe.
Si un moyen de réduire les dépenses porte sur les licenciements, ceux-ci ne sont pas sans coûts… Entre le licenciement lui-même, avec ses indemnités, et les répercussions du licenciement sur le moral des troupes et la productivité par exemple, licencier n’est pas forcément une bonne idée.
En moyenne, les entreprises qui traversent le mieux les crises sont celles qui licencient le moins. Alors on peut y voir un biais, car il est certain qu’avec suffisamment de ressources, l’entreprise est à la fois mieux armée pour conserver ses collaborateurs et rebondir. Mais les ressources n’expliquent pas tout, et à ressources égales, maintenir ses troupes est statistiquement une bonne stratégie. Il est en effet important de préparer l’après.
En France, nous bénéficions de dispositifs avantageux que d’autres pays ne mettent pas en œuvre, alors profitons-en ! Chômage ou activité partielle, aides ponctuelles, etc. sollicitez tout ce qui est disponible pour maintenir vos effectifs. Car en ligne de mire se dessine la reprise, et si vous n’êtes pas prêt lorsque la situation repartira, vous pourriez vous retrouver fragilisé par des concurrents qui, eux, seront en position de conquête.
L’enjeu porte en effet sur les compétences. Votre entreprise en a besoin, les trouver n’est parfois pas facile, et former a un coût – là encore. Alors vouloir économiser aujourd’hui pour dépenser plus après n’est peut-être pas rentable. A l’inverse, envisagez, autant que possible, des formations internes pour déployer les compétences entre collaborateurs. Développez la polyvalence et l’adaptabilité. Réorientez vos équipes aussi : vous avez peut-être moins besoin d’opérationnel, mais plus d’appui à la vente et à la relation client.
Si, malgré tout, vous êtes contraint de licencier, alors licenciez en une seule fois. Réduire les effectifs petit à petit, mois après mois, en avançant à vue, est particulièrement anxiogène et délétère pour l’équipe. Evitez cela. D’autre part, envisagez également les réductions d’effectifs sur la base du volontariat dans un premier temps.
Quoi qu’il en soit, gardez à l’esprit que vous ne construisez pas votre activité, ce sont vos collaborateurs qui le font. Les collaborateurs s’occupent de vos clients et, en retour, vos clients reviennent acheter plus souvent. Vous devez être le ciment qui maintient cette dynamique.
Votre clientèle.
Une autre de vos priorités en période de crise doit être votre clientèle : conservez-la et visez le long terme. Plusieurs cas de figures s’offrent à vous. Entre une fermeture totale due au confinement, une activité réduite car les clients achètent moins ou une suractivité parce qu’au contraire ils réorientent leurs dépenses chez vous, vous devez renforcer la relation entre vous et vos clients.
J’ai à l’esprit une anecdote datant de cet été, alors qu’une foule de touristes attendait son tour dans une boulangerie de la côte basque. La commerçante, très certainement fatiguée, se plaignait ostensiblement de sa situation auprès d’un client qu’elle connaissait visiblement mieux que les autres. Elle se plaignait, en soufflant fort, de « ces touristes français » qu’elle qualifiait d’« insupportables » tellement ils étaient nombreux et exécrables. « Les touristes étrangers étaient quand même mieux »… Quelle que soit la véracité éventuelle de cette observation, quand on est touriste français attendant son tour dans cette boulangerie, on n’a pas envie d’y revenir le lendemain ni d’en parler en bien à ses proches…
Tout ça pour dire que, quelle que soit votre situation, mettez l’accent sur la qualité de votre relation avec vos clients. En temps de crise, cela revient parfois à faire un investissement équivalent à celui que vous avez fait ou que vous feriez lors de la création de votre activité. Les premiers clients ne sont pas rentables, car ils ne sont pas suffisamment nombreux pour couvrir vos charges fixes. Mais vous savez que c’est temporaire, et vous êtes en mesure (grâce à vos tableaux de bord et vos simulations prévisionnelles), de gérer votre investissement. Là encore, visez le « après », et construisez votre clientèle de demain, une clientèle forte et heureuse d’acheter chez vous.
Cela peut vous amener à revoir votre modèle économique. Vous devrez peut-être modifier la façon dont vous positionnez votre entreprise auprès de vos clients existants et potentiels. Le monde a changé et, dans votre entreprise, les anciennes méthodes de commercialisation de vos produits ne répondent peut-être plus aux besoins actuels. Si vous ne vous adaptez pas et ne montrez pas que vous êtes en phase avec cette nouvelle réalité, les clients seront rebutés et les prospects vous retireront de leur liste de fournisseurs potentiels.
Dans tous les cas, concentrez-vous sur la mise en place d’une stratégie de contenus centrée sur la fourniture de solution, l’amélioration de l’expérience client, les programmes de fidélité et la maximisation de la « valeur perçue » sur vos marchés clés. Votre message marketing doit changer également.
En bref, pour adapter votre marketing, vous devez :
- Adapter votre message
- Ajouter de la compassion et de l’empathie
- Donner un nouveau sens de l’urgence à votre message
- Développer le virtuel et numérique
- Connaître vos chiffres et mesurer les résultats
Même si votre entreprise est fermée, vous pouvez garder le contact avec vos meilleurs clients et les tenir informés de vos projets de réouverture. Le maintien de relations solides avec vos clients peut vous fournir les éléments de base du succès. Les clients réguliers sont le meilleur moyen d’obtenir des bénéfices. Segmentez votre clientèle afin de vous assurer que vous vous en occupez de manière personnalisée. Encore une fois, en se concentrant sur les 20% de vos clients qui génèrent 80% de vos ventes. L’utilisation d’une base de données pour collecter des informations client est vitale. Créez des stratégies pour vendre à chaque segment.
Les systèmes et processus.
La maîtrise financière suppose de réduire les dépenses et assurer les rentrées d’argent. Nous avons vu qu’en matière d’équipe, la réduction des effectifs, si elle est parfois nécessaire, n’est souvent pas la meilleure stratégie. Les coûts ultérieurs et coûts d’opportunités sont à prendre en compte.
De même, au niveau marketing, réduire toutes les dépenses à néant est à proscrire. Vous avez, au contraire, besoin d’accroître votre communication et renforcer votre positionnement, voire vos parts de marché. Si le marché se contracte, il faut aller chercher des clients en dehors de votre marché habituel. Cela suppose un investissement.
De même en ce qui concerne les processus et systèmes de travail. Il est nécessaire de protéger sa trésorerie et limiter son endettement, on l’a vu, ce qui suppose de reporter à plus tard nombre de projets en cours. Reportez en particulier ceux qui portaient sur l’augmentation de votre capacité de production dans les conditions économiques anciennes. Ces conditions vont changer, vous allez peut-être faire évoluer votre modèle économique, alors il se peut que vos projets d’hier ne soient tout bonnement plus viables demain.
En revanche, profitez de cette période de crise pour réorganiser vos systèmes de travail. Appuyez vous sur les 4 piliers générant un effet de levier :
1. Le personnel et la formation.
Développez les compétences manquantes dans le nouveau contexte, réorientez les compétences internes, faites évoluer les collaborateurs vers les postes qui sont en demande. Par exemple, si vous avez une baisse de production, dirigez les opérateurs concernés vers des fonctions à plus forte création de valeur. Formez aux nouvelles fonctions, mais aussi aux nouvelles façons de faire et protocoles sanitaires. Cela sécurisera l’organisation, et rassurera vos collaborateurs aussi bien que vos clients.
2. Le pilotage et les systèmes d’information.
Vous avez besoin de vous ajuster plus rapidement et de vous adapter en continu. Pour vous y aider, affinez vos tableaux de bord et vos systèmes de « tests et mesure ». Par cela, on entend les systèmes qui vous permettent d’évaluer l’impact des stratégies, tactiques et actions que vous allez conduire. Cela vous sera essentiel pour décider de les continuer, de les améliorer ou de les arrêter.
3. Les opérations et la livraison.
Ce sera d’autant plus important que votre modèle économique va peut-être évoluer. Toutefois, cela ne se limite pas à cette situation. Vous avez toujours besoin de réviser vos processus à ce stade, pour toujours améliorer l’expérience client. Faites de vos clients des fans inconditionnels et revoyez vos processus pour leur facilité l’achat et les époustoufler une fois qu’ils ont acheté.
4. La technologie.
Au même titre que pour les opérations et la livraison, il y a peut-être des modifications ou des évolutions majeures, concernant la technologie, que vous reportiez précédemment car le niveau d’activité ne vous laissait pas le temps de les mettre en place. Si vous traversez un creux dans votre activité, mettez-le à profit pour moderniser votre entreprise maintenant. Cela porte en particulier sur le numérique, pour lequel les aides se multiplient. Les entreprises qui s’en sortiront le mieux seront celles qui passeront un cap technologique décisif, car leur activité sera plus flexible et efficace. Faites en sorte d’en faire partie !
Le leadership.
Dirigeant, chef d’entreprise, vous savez la nécessité d’un fort leadership pour conduire l’équipe. En période de crise, cette nécessité est encore plus prégnante, pour plusieurs raisons.
Premièrement, quand l’avenir devient flou, chacun cherche à se raccrocher à des certitudes, alors que justement tout devient de moins en moins certain. Les gens peuvent basculer dans le déni, la rumeur, la croyance en des informations erronées voire mensongères mais qui rassurent. Ils chercheront un leader, alors soyez ce leader, un leader positif et constructif !
Deuxièmement, en période de crise, l’adaptation devient une nécessité. Or, qui dit adaptation dit changement. Pour changer, il faut identifier ce qui ne va pas, construire une vision de ce qu’il faut construire, avancer pas à pas et vaincre les résistances. Ces dernières sont principalement liées aux peurs, qui, dans le contexte actuel, portent aussi bien sur le risque lié à la Covid-19, que sur la crainte du changement lui-même. Conduire ce changement collectif demande un fort leadership.
Enfin, vous êtes à la tête d’une organisation, au sens large. Celle-ci comporte des collaborateurs, des clients, des fournisseurs, des associés, etc. Vous ne pourrez pas conduire le changement seul, vous avez besoin de travailler en collectif, avec tous. En tant que véritable chef d’orchestre, vous donnerez le tempo pour que votre organisation agisse de concert, de manière cohérente et convergente. Vous vous appuierez sur toutes ces personnes qui en retour vous soutiendront, vous, le leader que vous êtes.
Bien sûr, si l’avenir est flou pour les autres, il l’est aussi pour vous, et la tâche de conduire une équipe en période de crise n’est pas forcément simple. Mais c’est votre mission, en quelque sorte, alors pour la conduire avec brio, appuyez-vous sur ces quatre piliers :
Le mental
Faire preuve de caractère au plan personnel. Renforcez les valeurs positives sur lesquelles vous vous appuyez pour avancer, comme l’intégrité, la confiance, l’engagement, la responsabilité. Ayez vos rituels pour renforcer votre mental, éloignez-vous des informations anxiogènes, ayez des activités bien-être et sportives pour rester d’attaque. Maintenez votre niveau d’énergie !
L’esprit
Aiguiser votre acuité entrepreneuriale et fixez la direction. En tant que leader, vous inspirerez en construisant une vision du futur et en la partageant avec l’équipe. Ne cherchez pas à deviner ce qui va se passer, personne ne le peut. Construisez plutôt un projet ambitieux, inspirant et mobilisateur qui permettra à tous d’avancer ensemble dans la même direction.
Le cœur
Mobiliser l’engagement individuel. Laissez parler la passion qui est en vous ! Et partagez cette passion. La motivation ne se crée pas, elle se cultive, alors cultivez celle de vos collaborateurs en étant passionné avec eux. Vous verrez, ils mettront alors du cœur à l’ouvrage. Faites battre le cœur de votre entreprise !
Le corps
Renforcer la capacité de l’entreprise. Écrivez la partition pour mettre la mission en musique. Organisez, renforcez et préparer l’entreprise. Développez l’adaptabilité et l’agilité au sein des équipes. Mobilisez et faites évoluer l’ensemble de la structure !
Nécessité d’une communication accrue.
Pendant une crise, la communication est essentielle. Vous devez augmenter le rythme de vos communications et parfaire votre message afin d’en améliorer les résultats. Pour affirmer votre leadership et obtenir de meilleurs résultats, vous devez développer une meilleure communication. Commencez par votre équipe. Elle doit avoir de vos nouvelles au moins une fois par jour. Vous devez garder votre équipe informée, elle doit se sentir en sécurité et prise en charge… Elle se tournera ainsi vers vous pour connaitre la direction à suivre, l’orientation à prendre et pour toutes les questions ayant trait à la sécurité.
Intensifiez aussi votre communication avec vos fournisseurs, votre propriétaire, votre communauté, votre famille et vos clients. Le manque d’information et de communication conduit à des sentiments et des pensées négatives qui entrainent des attitudes et des actions négatives. En tant que leader, vous visez l’opposé !
Une dernière chose : en tant que leader, vous aurez besoin de relais. Ce sera une des fonctions de votre communication accrue. Trouvez et appuyez-vous sur les leaders dans votre équipe. Développez le leadership à tous les étages dans l’entreprise. Favorisez la décentralisation des prises de décisions. Ce sera d’autant plus simple que votre projet et vision de l’avenir seront affirmés. Chacun pourra alors agir plus vite, avec plus d’agilité, si le sens commun et le projet partagé sont clairs et acceptés. Les entreprises qui traversent le mieux les crises sont celles où les capacités décisionnelles sont partagées dans l’organisation. Construisez une entreprise comme celles-là!